Même si les attaques de sclérotinia sont peu fréquentes, la maladie reste redoutée en raison de sa très forte nuisibilité potentielle. Des leviers de lutte alternative se développent, néanmoins leurs efficacités sont insuffisantes. Le recours à la protection fongicide au cours de la floraison reste donc une pratique courante.
Aucune solution curative n’existe à ce jour pour lutter contre le sclérotinia. Cela contraint à intervenir de façon préventive pour éviter les contaminations lors de la chute des pétales. Le positionnement du fongicide est essentiel pour garantir une bonne efficacité de la protection : intervenir trop tôt ou trop tard par rapport au stade G1 (chute des premiers pétales, dix premières siliques avec une longueur inférieure à 2 cm) réduit significativement l’efficacité. Le stade G1 se concrétise généralement 6 à 12 jours après le début de la floraison du colza, selon les conditions climatiques.
En cas de pluies annoncées au stade clé d’intervention, il est préférable d’anticiper (un tout petit peu) plutôt que de retarder l’intervention. Un créneau de deux heures de sec après l’application suffit pour sécuriser l’efficacité du fongicide, sauf en cas de pluie lessivante (20 mm) après le traitement.
Des solutions efficaces
La lutte fongicide contre le sclérotinia du colza s’oriente aujourd’hui vers des spécialités “haut de gamme” qui présentent toutes un bon niveau d’efficacité vis-à-vis du sclérotinia et qui ne coûtent pas systématiquement plus cher que des triazoles classiques (tébuconazole, metconazole). C’est le cas notamment du prothioconazole cette année. Des solutions récentes sont également disponibles comme le méfentrifluconazole ou la mandestrobine, les niveaux d’efficacité de ces solutions (proposées en pack ou en association toute formulée) sont équivalents à ceux des références du marché.
Malgré tout, cela ne veut pas dire que l’on peut faire n’importe quoi. Quelques règles sont à suivre pour assurer la durabilité de ces solutions, dans un contexte où des souches de sclérotinia résistantes aux fongicides de la famille des SDHI (boscalid, bixafen, fluopyram) ont déjà été identifiées. Un fongicide à base de SDHI doit obligatoirement être associé à un autre mode d’action dont l’efficacité est reconnue comme régulière (par exemple, prothioconazole, metconazole, méfentrifluconazole et tébuconazole ; les solutions de biocontrôle restent insuffisantes). Son emploi doit être limité à une application par campagne.
De la même manière, le fludioxonil a une action unisite. Il n’est pas recommandé de l’utiliser seul et sera toujours proposé en association avec un autre mode d’action (triazole (DMI) ou strobilurine (QoI-P).
Un passage suffit
Les stratégies à double traitement (deuxième traitement 10-15 jours après le stade G1) ne montrent pas de gain d’efficacité vis-à-vis du sclérotinia dans la très grande majorité des situations. Elles sont très rarement rentables : le rendement net (coût fongicides et passages déduits) est plus faible pour la double application que pour un passage unique au stade G1 (figure ci-dessus). Elles peuvent néanmoins montrer un intérêt, qui reste aléatoire, dans quelques situations à très haut potentiel de rendement, en situation de floraison très longue, de fortes pression maladies en fin de cycle (mycosphaerella, alternaria, oïdium) qui nécessiteraient un relai, ou de première intervention trop anticipée pour assurer une protection correcte de la floraison.
Protection des pollinisateurs
Tous les produits phytopharmaceutiques autorisés pendant la floraison doivent être appliqués dans la plage de traitement de 5 h, soit 2 h avant le coucher du soleil et 3 h après le coucher du soleil.
Arrêté dit «mélanges» : Les mélanges impliquant pyréthrinoïdes et triazoles en période de floraison ou de production d’exsudats sont formellement interdits. Si les deux traitements doivent être effectués sur la même parcelle, un délai de 24 h minimum doit être respecté entre les applications et l’insecticide doit être appliqué en premier.
Aurore BAILLET
Terres Inovia