Vigilance sur les prix et la maladie

Christophe Maginot, président de la section lait de la FRSEA, revient sur les contextes sanitaire et économique dans lesquels évoluent les éleveurs laitiers du Grand Est.

«Suite à l’apparition de nouveaux cas de DNC dans l’Ain et le Jura, le salon Agrimax a annulé les concours bovins. Les organisateurs ont agi en responsabilité, avant même que l’État n’interdise les rassemblements festifs. Car, face à l’apparition de ces nouveaux foyers, ainsi que ceux en Occitanie, la France a pris conscience qu’il y avait encore des mouvements illégaux d’animaux, malgré les restrictions.
L’Europe s’est réunie pour étudier le cas de l’évolution de la DNC en France. En amont de cette échéance, la ministre de l’Agriculture a donc décidé de réunir un parlement du sanitaire le vendredi 17 octobre. À cette occasion, elle a annoncé les mesures qui seraient prises. Ces décisions n’étaient pas soumises au vote comme c’est habituellement le cas. Elle a alors annoncé le blocage des exportations. C’est la mesure qui a le plus fait réagir, car elle risque de déstabiliser les marchés économiques. Malgré l’ampleur des conséquences qui découlent de cette décision, aucune mesure compensatoire n’a été annoncée. Suite à la mise à l’arrêt de l’export, certains marchands annonçaient déjà une baisse des cours. Avec la FNPL, nous encourageons les éleveurs à ne pas brader leurs animaux et à attendre la réouverture des frontières qui devrait avoir lieu dans trois semaines.
La profession souligne l’incohérence entre la dureté de l’arrêt de l’export, et le manque de fermeté sur l’application des mesures déjà mises en place. La couverture vaccinale, d’abord. Dans les zones touchées par la DNC, certains élevages font de la résistance et ne vaccinent pas. La question se pose donc d’imposer la vaccination dans ces zones. Lorsqu’un foyer est détecté, certains éleveurs s’opposent à l’abattage de leurs animaux ce qui augmente le risque de contamination des élevages voisins. Nous n’avons pas eu de réponses concrètes sur ces sujets, mais, nous avons aussi demandé à ce qu’il y ait plus de contrôle sur les mouvements afin de mettre fin aux mouvements frauduleux, ce à quoi la ministre a consenti.
Les deux autres mesures, paraissent de bon sens : l’interdiction de rassemblements de bovins lors d’événements festifs, dont Agrimax et l’interdiction de tout rassemblement d’animaux de type centre d’allotement dans les régions touchées par les foyers.
Bien que la région Grand Est ne soit pas concernée pour le moment, nous demandons aux éleveurs d’être extrêmement vigilants sur les mouvements d’animaux. Il en va de la responsabilité de chacun.
D’un point de vue plus général sur la situation sanitaire, notre région a été touchée assez fortement pas la FCO-3. Nous subissons toujours un certain contrecoup avec des retards de reproduction, des décalages dans les vêlages, des problèmes de fertilité… Dans les courbes, la région peine toujours à retrouver son niveau de production. Aujourd’hui, en région, pour la FCO, la situation est «assez calme» car les éleveurs ont largement vacciné leurs troupeaux contre les sérotypes 3 et 8. Même pour la MHE, nous sommes la région de France qui a le plus vacciné en proportion. Je souligne l’effort qui a été fait par les éleveurs sur la vaccination. Ils ont pris la responsabilité de se protéger et c’est une bonne chose car, la pression sanitaire a tendance à augmenter via la circulation des moucherons porteurs de maladies, en raison du réchauffement climatique notamment. Et, nous le savons, le meilleur moyen de se protéger contre ces maladies virales reste la vaccination.
D’un point de vue économique, depuis deux ans, la situation des élevages laitiers s’est améliorée. Pour autant, elle est loin d’être satisfaisante. Il reste des marges de progrès sur le prix du lait, pour arriver à une juste rémunération des producteurs et de leurs coûts de production. Lorsque l’on regarde les pays voisins, l’écart de prix reste significatif : entre 30 et 50 €. Nous ne comprenons pas pourquoi cet écart de prix se maintient. Aussi, nous sommes inquiets des annonces faites sur une baisse à venir de prix du lait. Nous ne comprenons pas cette stratégie car, en France, le marché n’est pas saturé en termes de produits laitiers et de production laitière. Nous trouvons d’autant plus dommage que ces annonces arrivent au moment où vont commencer les négociations commerciales. Et, lorsque l’on commence à dire aux producteurs que l’on va baisser le prix du lait, il semble compliqué pour les entreprises de négocier ensuite des hausses auprès de la grande distribution».

Propos recueillis par
Marion FALIBOIS