Un chantier en douceur grâce au débardage à cheval

Pour intervenir dans le bois de Maillette, un massif resté quasiment intact depuis la mise en eau du lac de Madine, le Département a choisi une méthode respectueuse : le débardage à cheval. Cette technique permet d’extraire les grumes issues de la coupe d’amélioration sans compacter les sols ni perturber la biodiversité. Douze chevaux de trait se relaient ainsi pour mener à bien ce chantier.

Le département de la Meuse possède 75 hectares de forêt autour du secteur de Madine, dont 20 forment le bois de Maillette, situé sur les communes de Montsec et Buxières-sous-les-Côtes. Dans cette enclave, la nature évolue depuis des décennies sans intervention humaine. «Personne n’a travaillé ici depuis la mise en eau du lac de Madine», glisse Jean-Philippe Vautrin, vice-président du Département chargé de l’Environnement, de la Transition écologique, de l’Agriculture et de la Forêt. Les arbres y ont vieilli en toute tranquillité, et les saisons ont modelé un paysage où chaque niveau de végétation témoigne du temps passé.

Un refuge pour la biodiversité

Dans ce bois, de nombreux chênes ont atteint des stades de développement rares. Leur silhouette, façonnée par les années, raconte l’histoire d’un massif qui s’est structuré librement. Autour d’eux se mêlent troncs renversés, arbres sénescents, bois morts et zones humides. L’ensemble constitue un havre de paix pour les amphibiens, les insectes et les oiseaux protégés, qui évoluent loin des perturbations humaines. Grâce à cette tranquillité, le bois de Maillette est devenu un refuge discret pour la biodiversité locale.
L’espace est d’ailleurs intégré au site Natura 2000 et classé Espace naturel sensible depuis 1994.

Une gestion encadrée pour garantir la continuité

Pour renforcer la préservation du massif, une demande de contrat «dispositif favorisant le bois sénescent» a été déposée en partenariat avec le Parc naturel régional de Lorraine (PNRL) et l’Office national des forêts (ONF). Ce contrat assurera une protection de 30 ans, mais, en amont, une phase de gestion était nécessaire.

Un inventaire a permis de recenser plus de 700 arbres «à protéger». «L’idée, c’est de faire vieillir les arbres pour favoriser les peuplements», explique Johan Claus, chargé de mission Natura 2000. Pour accompagner le développement des sujets retenus, une coupe d’amélioration s’avère utile. «L’idée est de couper les bois au plus proche des chênes marqués pour qu’ils puissent avoir une croissance optimisée», précise Claire Berthelon, technicienne forestière à l’ONF.

Cette intervention ouvrira aussi la canopée, permettant à la lumière d’atteindre le sol et de stimuler la régénération naturelle.
Sur ce chantier, environ 600 m³ de bois devraient être récoltés, avant d’être vendus à des entreprises locales.

Un chantier mené avec des chevaux

Pour ménager les sols et circuler sur ce terrain escarpé, la technique du débardage à cheval a été choisie. «Sur ce type de chantier, les chevaux passent plus facilement que les machines et limitent l’impact sur les sols», souligne Patrick Bernard, membre de l’association Championnat de France de débardage, venu apporter son expertise lors d’une visite de terrain.

L’entreprise Parisse Cheval Débardage basée à Gondreville (54), choisie pour son professionnalisme et son savoir-faire, intervient depuis septembre dans le bois de Maillette. Après un bûcheronnage classique qu’ils réalisent eux-mêmes, Tom Gobeaux et Denis Parisse fixent les grumes derrière les chevaux Ardennais, qui les tirent en traction directe jusqu’aux limites des parcelles. Douze chevaux de trait se relaieront tout au long du chantier, qui devrait se terminer à la fin de l’année, pour mener à bien cette intervention dans les meilleures conditions.

Un travail précis et silencieux

«À gauche… doucement… c’est bien». Tom Gobeaux sait murmurer à l’oreille de ses chevaux, qui obéissent avec précision. Depuis septembre, il intervient avec Denis Parisse sur un chantier de débardage du bois de la Maillette avec leurs chevaux Ardennais. «Ce sont des petits chevaux qui se faufilent partout et qui ont un très bon rapport qualité poids», explique ce dernier.

À la force de leurs muscles, deux chevaux de trait ardennais tractent les grumes coupées avec soin, réalisant un travail précis et silencieux, tout au long de la journée. Ils débardent en moyenne 12 m³ de bois par jour. «C’est beaucoup plus long, mais beaucoup plus écologique. Nous privilégions des traînes plus petites, faciles à manipuler, plutôt que de grosses grumes» reconnaît Tom Gobeaux.

Parmi les douze chevaux de l’entreprise, deux sont présents en permanence, pendant ces quatre mois de chantier. «Toutes les semaines, nous faisons tourner les chevaux sur le chantier», poursuit Denis Parisse. «C’est aussi un terrain idéal pour former les jeunes» ajoute-t-il, rappelant que le dressage complet d’un cheval prend trois à quatre ans avant qu’il soit pleinement opérationnel.